Grâce à un processus appelé « cryoconservation », la jeune entreprise de Toronto permet aux gens de conserver facilement leurs propres cellules souches pour utilisation dans le cadre de traitements régénérateurs futurs

Si les entreprises du secteur anti-âge cherchent à ralentir le passage du temps, les progrès à cet égard se réalisent à une vitesse fulgurante. Au cours des dix dernières années, l’importance accordée aux crèmes et aux vitamines a diminué en faveur des technologies de la beauté, et l’apport de la médecine régénérative et de la thérapie par cellules annonce des avancées considérables dans ce lucratif secteur. La jeune entreprise canadienne Acorn Biolabs est à l’avant-garde de ce que son cofondateur et chef de la direction, le docteur Drew Taylor, appelle la « révolution antivieillissement ».

Établie à Toronto en 2017, Acorn Biolabs offre aux gens la possibilité de conserver leurs cellules souches pour utilisation dans le cadre de traitements futurs ciblant un éventail de préoccupations cosmétiques allant de la repousse des cheveux au rajeunissement cutané. Les thérapies cellulaires pourraient également être utilisées à des fins autres que cosmétiques, notamment la guérison de blessures et le traitement de certaines maladies.

Le nom Acorn (gland de chêne) fait allusion aux écureuils qui amassent des glands pour l’hiver durant la saison chaude, tout comme les clients de l’entreprise qui conservent leurs cellules souches afin de pouvoir s’en servir plus tard. « Du gland émerge un chêne robuste, » ajoute M. Taylor.

Les cellules prélevées ne tarderont pas à servir : plus de 240 essais cliniques de phase III de thérapies par cellules sont en cours depuis 2022, et le marché devrait atteindre 26 milliards de dollars d’ici 2026.

Nous avons rencontré M. Taylor et Will Hall, chef de l’exploitation d’Acorn Biolabs, pour en savoir plus sur le domaine en pleine évolution des technologies médicales et sur la manière dont ils comptent mener la charge pour mettre son potentiel à la disposition des consommateurs.

La révolution antivieillissement

Les technologies antivieillissement ne sont pas une nouveauté, mais M. Taylor croit que le secteur est à l’aube d’une nouvelle ère. « Auparavant, on ne visait que le traitement des symptômes, tandis qu’aujourd’hui, l’accent est sur l’intervention et la prévention, explique M. Taylor. Au fond, le vieillissement est une accumulation de dommages. À mesure qu’une personne vieillit, ces dommages se manifestent sous forme de maladies. En traitant les effets du vieillissement, nous pouvons prévenir ces maladies. »

Selon lui, les gens ne cherchent pas nécessairement à vivre plus longtemps, mais à maximiser leur qualité de vie. C’est pourquoi Acorn s’efforce de prolonger la santé de ses clients plutôt que de prolonger leur durée de vie.

De nombreux consommateurs ont déjà adopté cette approche préventive du vieillissement en intégrant à leur quotidien des routines bien-être, des compléments alimentaires, voire des médicaments. Toutefois, le secteur de la médecine régénérative demeure sous-exploité, malgré son considérable potentiel de marché.

En outre, les consommateurs se tournent de plus en plus vers des solutions antivieillissement naturelles. « Quoi de plus naturel que de tirer parti de son propre biomatériau ? » demande M. Taylor.

Acorn offre à ses clients une chance unique de le faire en prélevant des cellules souches de manière non invasive à partir de follicules pileux. Les cellules sont ensuite congelées à -190 degrés Celsius, ce qui suspend leur métabolisme ainsi que leur vieillissement. Ce processus, appelé « cryoconservation » dans le jargon scientifique, est aussi couramment employé pour la conservation de spermatozoïdes, d’ovules et de sang de cordon ombilical. Selon Acorn, en théorie, les cellules peuvent être ainsi conservées indéfiniment. En outre, la jeune entreprise a breveté des traitements fondés sur les cellules issues de follicules pileux.

« À mon avis, la trajectoire de la [médecine régénérative] ressemble à celle d’autres technologies qui ont mis du temps à atteindre leur potentiel. Je la compare souvent au vol aérien, car, comme lui, il s’agit d’une technologie exaltante et hautement prometteuse. »

À terme, les cellules souches pourront être utilisées pour recréer les substances que le corps cesse de produire avec l’âge, comme le collagène, l’élastine, l’acide hyaluronique et divers facteurs de croissance. « Nous sommes sur le point de libérer le potentiel de ce secteur », affirme M. Taylor.

« À mon avis, la trajectoire de la [médecine régénérative] ressemble à celle d’autres technologies qui ont mis du temps à atteindre leur potentiel. Je la compare souvent au vol aérien, car, comme lui, il s’agit d’une technologie exaltante et hautement prometteuse, dit-il. Or, à ses débuts en 1903, la technologie ne permettait de transporter des passagers que sur quelque 30 mètres, alors les gens n’y voyaient pas beaucoup de valeur. Il a fallu quarante ans pour que le premier passager traverse l’Atlantique. Dans les dix ans qui suivirent, on a découvert le vol supersonique, et au cours de la décennie suivante, on a envoyé un homme sur la lune. Cette technologie a évolué à un rythme exponentiel. À mon avis, en médecine régénérative, nous n’en sommes encore qu’à traverser l’Atlantique. »

M. Taylor entrevoit un avenir où les cellules souches seront utilisées pour imprimer des organes en trois dimensions sur demande.

Faire le lien entre le sport et les sciences

Titulaire d’un baccalauréat et d’une maîtrise en biologie moléculaire, cellulaire et du développement, de l’Université du Michigan et d’un doctorat en génie biomédical de l’Université de Toronto, M. Taylor n’a pas suivi le parcours traditionnel d’un fondateur d’entreprise en démarrage ou du domaine médical. Il a fait ses débuts en tant que joueur des ligues mineures de baseball dans les rangs des Blue Jays de Toronto et des Phillies de Philadelphie.

Will Hall, chef de l’exploitation d’Acorn, pratiquait la voile de compétition. Il a même remporté les Jeux mondiaux à quelques reprises. Les cofondateurs ont trouvé dans le sport un lieu commun qui leur a permis de découvrir leur intérêt partagé pour les soins de santé et le fonctionnement du corps.

Toutefois, le baseball et la voile ne sont pas des affaires du passé pour M. Taylor et M. Hall. Leurs expériences en tant qu’athlètes ont grandement influencé leur approche des affaires dans le secteur fortement concurrentiel des entreprises en démarrage.

« Ma carrière en voile m’a appris à surmonter les difficultés. Quand on est entrepreneur, il y a bien des choses qui peuvent mal tourner, confie M. Hall. Une personne qui n’a pas fat ses preuves dans un autre milieu est susceptible de craquer ou d’abandonner. Nous avons tous deux connu des défaites, mais nous nous sommes relevés et avons triomphé. Nous avons appris à persévérer. »

« Ma carrière dans le milieu sportif m’a permis de m’épanouir et de gagner une meilleure connaissance de moi-même et de ma place au sein d’une équipe. »

« À vrai dire, je suis plus doué en sciences qu’au baseball. On pourrait dire que j’ai trouvé ma place, plaisante M. Taylor. Mais ma carrière dans le milieu sportif m’a permis de m’épanouir et de gagner une meilleure connaissance de moi-même et de ma place au sein d’une équipe. Dans le domaine de la voile, chaque personne remplit un rôle précis et ses coéquipiers dépendent d’elle. C’est la même chose au baseball : le receveur, le champ centre et le lanceur ont des aptitudes distinctes. Des personnes aux talents très différents unissent leurs forces pour atteindre un objectif commun. »

La meilleure leçon qu’il a apprise des sports d’équipe ? Comment cultiver la collaboration et s’entourer de personnes dotées d’aptitudes que lui-même ne détient pas. « Acorn est le fruit de cet apprentissage. Nous avons créé une équipe du tonnerre. »

« Dernièrement, nous avons engagé une déléguée commerciale en chef, Crystal Muilenburg, dotée de près de 20 ans d’expérience en médecine esthétique. Elle a chapeauté le déploiement de certains des produits qui ont connu le plus grand succès dans le secteur, aux États-Unis et à l’échelle internationale. En recrutant les meilleurs talents au moment opportun, nous pouvons atteindre des sommets inégalés. »

La carrière de M. Taylor en baseball lui a aussi fait prendre conscience des besoins que la médecine régénérative pouvait combler. « J’ai dû abandonner ma carrière en tant que joueur de baseball en raison d’une blessure à l’épaule. J’aurais aimé avoir accès à des solutions de médecine régénérative à cette époque. »

Tirer parti de la réglementation gouvernementale

Le lent mécanisme de la bureaucratie gouvernementale peut constituer un obstacle pour les jeunes entreprises au rythme dynamique. Toutefois, M. Taylor affirme que dans le domaine de la médecine régénérative, l’appareil réglementaire canadien permet aux entreprises de se distinguer de leurs concurrents étrangers.

« Malheureusement, le monde des cellules souches est une zone plutôt grise à l’heure actuelle. Les publicités pour des traitements par injection de cellules souches offerts dans des destinations touristiques à l’extérieur du Canada et des États-Unis pullulent sur Internet et sur les médias sociaux. Les gens voyagent vers ces pays pour contourner les réglementations imposées par la FDA et Santé Canada, affirme-t-il. Certains se plaignent de la lenteur avec laquelle ces organismes évoluent, mais ils agissent dans l’intérêt des patients et veillent à ce que les traitements soient administrés de manière sûre et efficace. En les contournant et en cherchant des soins dans le Sud, une personne s’expose à des risques. »

Il a lui-même vu des patients revenir au pays après de tels voyages dans un état pire qu’avant leur traitement. Si d’autres sont satisfaits de leur expérience à l’étranger, les résultats demeurent imprévisibles dans un environnement où des groupes et individus peu scrupuleux s’empressent d’exploiter l’énorme potentiel des traitements à base de cellules.

En outre, contrairement à Acorn, la majorité des entreprises internationales n’utilisent pas les propres cellules des patients, ce qui peut engendrer des problèmes de rejet.

À ce jour, Acorn compte deux laboratoires certifiés ISO (Organisation internationale de normalisation) – un au Canada et un aux États-Unis – où l’entreprise prélève et traite les cellules. Son laboratoire aux États-Unis a été contrôlé par la FDA et agréé par la California Tissue Bank (banque de tissus de Californie). Comme leurs services actuels sont considérés comme cosmétiques plutôt que diagnostiques ou médicaux, ils ne sont pas encore assujettis à des approbations supplémentaires. Selon M. Taylor, il s’agit de la prochaine étape pour l’entreprise.

Dans l’intervalle, Acorn a récemment amassé plus de 8 M$ US à l’issue d’un tour de financement de série A mené par Merz Aesthetics. TELUS Capital de risque mondial a également contribué. L’entreprise utilise les fonds pour financer la mise au point de ses médicaments cosmétiques topiques brevetés, qui seront offerts dans les cabinets de dermatologues et de chirurgiens plasticiens au cours de la prochaine année. Merz est l’une des entreprises de médecine esthétique les plus importantes au monde. Ses marques Xeomin, Radiesse, Ultherapy et Belotero sont bien connues dans le domaine des produits cosmétiques médicaux. L’intérêt que l’entreprise accorde à Acorn est un atout de taille.

« En outre, plus de seize médecins ont contribué au tour de financement. C’est formidable, car leur participation valide le travail que nous avons accompli à ce jour, » déclare M. Hall.

Il attribue une part du succès de la collecte de fonds d’Acorn au fait que l’entreprise se démarque de ses concurrents en biotechnologies. En effet, la plupart des jeunes entreprises du secteur demeurent en stade pré-revenu pendant une longue période. Acorn, quant à elle, réalise déjà des revenus, lesquels devraient connaître une croissance spectaculaire avec le lancement de traitements cosmétiques. De plus, aux yeux des investisseurs, Acorn pose un faible risque du fait qu’elle a pénétré le marché par le biais des médicaments cosmétiques topiques plutôt que des soins médicaux traditionnels.

Qu’est-ce que l’avenir réserve à Acorn Biolabs ?

M. Taylor et M. Hall sont optimistes quant à l’avenir proche de l’entreprise : ensemble, les recherches fructueuses, le financement obtenu et les approbations réglementaires accélèrent la croissance potentielle d’Acorn. M. Taylor nourrit des projets ambitieux pour les cinq prochaines années : « J’ai espoir que nos produits seront offerts partout au Canada et aux États-Unis et que chaque patient aura la possibilité de conserver ses cellules, » confie-t-il.

« De plus, je crois qu’il sera possible de conserver des cellules auprès d’Acorn à l’extérieur de l’Amérique du Nord et que nos traitements cosmétiques topiques seront pleinement déployés dans ces régions. Enfin, j’espère qu’Acorn lancera les prochaines versions de ses traitements et accomplira d’importants progrès vers la mise au point de produits injectables. »

Pour en apprendre davantage sur Acorn Biolabs, visitez son site Web à l’adresse acorn.me.

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