Trois acteurs de premier plan de l’écosystème canadien des entreprises en démarrage parlent des obstacles que doivent surmonter les fondateurs noirs.
Il est avantageux de favoriser la diversité en milieu de travail; les organisations qui le font innovent davantage que les autres, et elles affichent un taux de mobilisation des employés supérieur, profitent d’un plus grand bassin de talent et obtiennent même de meilleurs résultats financiers. Le milieu des fondateurs d’entreprise noirs se mobilise pour faire en sorte que tous les entrepreneurs profitent d’un même degré d’inclusion dans l’écosystème des entreprises en démarrage et aient un accès égal au capital, aux réseaux en place et aux occasions essentielles à la réussite.
Certains indices montrent que les choses s’améliorent dans le milieu entrepreneurial pour les fondateurs noirs, mais il demeure des obstacles systémiques. Selon une étude de la Chambre de commerce noire du Canada, le développement personnel et le mentorat ainsi que l’admissibilité au capital et l’obtention de fonds figurent parmi les besoins les plus pressants des propriétaires d’entreprise noirs. L’accès difficile à ces ressources représente un véritable obstacle à la réussite entrepreneuriale. De plus, les Canadiens noirs de deuxième génération continuent de gagner beaucoup moins que les autres, malgré un taux égal de diplomation universitaire.
Afin d’examiner les défis auxquels font face les fondateurs noirs, RBCx s’est entretenue avec trois acteurs de premier plan de l’écosystème canadien des entreprises en démarrage. Lise Birikundavyi est cofondatrice et associée directrice à BKR Capital, le premier fonds de capital-risque profitant d’un appui institutionnel et dirigé par des personnes noires. Sean Green est cofondateur et chef de la direction d’ARTERNAL, une plateforme de logiciels-services interentreprises et intégrée verticalement qui s’adresse au monde de l’art et connaît une croissance rapide. Alfred Burgesson est fondateur et PDG de Tribe Network, une communauté de personnes noires, autochtones et de couleur du milieu des technologies, de l’entrepreneuriat et de l’innovation au Canada, établie à Halifax, en Nouvelle-Écosse. La table ronde a été animée par David Eboh, vice-président adjoint, Gestion relationnelle, Capital-risque RBCx.
Les participants ont parlé de ce qui est selon eux nécessaire à la réussite des fondateurs d’entreprise noirs dans l’écosystème technologique canadien et des changements qui s’imposent pour éliminer les obstacles.
« Le ton des échanges est différent maintenant. Il y a plus d’espoir et de dynamisme »
Mme Birikundavyi estime que l’écosystème entrepreneurial évolue dans la bonne direction pour les propriétaires de jeunes entreprises noirs. « Le ton des échanges est différent maintenant. Il y a plus d’espoir et de dynamisme », affirme-t-elle, en soulignant que les membres des communautés noires s’épaulent de plus en plus pour tirer profit des forces de chacun et favoriser le succès de tous.
M. Green, dont l’entreprise ARTERNAL fait partie du portefeuille de jeunes entreprises de BKR, a lui aussi constaté des changements positifs depuis la fondation de son entreprise. « Il est encourageant de voir l’évolution du milieu du capital-risque. Je suis un fondateur d’entreprise noir qui a comme principal investisseur une société de capital-risque dirigée par des Noirs. Une telle situation n’aurait jamais été possible à mes débuts, déclare-t-il. C’est un premier pas. Comment faire plus ? »
Les fondateurs d’entreprise noirs doivent avoir un meilleur accès au capital
Comme le reconnaîtront tous les fondateurs d’entreprise, l’accès au capital est un des éléments essentiels pour bâtir et faire croître une jeune entreprise en technologie. À l’étape du démarrage, alors qu’il faut injecter des liquidités, la recherche de financement représente bien souvent l’une des plus grandes difficultés. La famille, les amis, les investisseurs providentiels et les accélérateurs d’entreprise sont des sources potentielles, tout comme les subventions gouvernementales, les incitations fiscales et le capital-risque.
« Nous pouvons nous tourner vers nos amis seulement, et non pas vers nos amis et notre famille. Pour la plupart d’entre nous, il n’y a pas de patrimoine à transférer d’une génération à l’autre. »
« Pour nous, il est très difficile de réunir des capitaux, indique M. Green. Nous pouvons nous tourner vers nos amis seulement, et non pas vers nos amis et notre famille. Pour la plupart d’entre nous, il n’y a pas de patrimoine à transférer d’une génération à l’autre. » À cela s’ajoutent souvent des obstacles systémiques. En 2023, aux États-Unis, moins de 0,5 % des fonds de capital-risque attribués pendant l’année sont allés à des fondateurs d’entreprise noirs.
« Les gens me demandent comment j’ai pu me constituer une épargne pour me lancer en affaires, indique M. Green. Je leur réponds : “Quelle épargne ?” J’ai commencé mon parcours d’entrepreneur les poches vides. Tout ce que j’avais, c’était le souvenir du petit travail d’appoint de ma mère, qui a été ma source d’inspiration. Peu éduquée mais très déterminée, ma mère a travaillé d’arrache-pied et a réussi à épargner assez d’argent pour payer nos études. » M. Green attribue son esprit entrepreneurial à sa mère, qui a créé et exploité une petite entreprise de services d’entretien ménager à Toronto.
Avec une histoire inspirante, il est plus facile d’obtenir du financement
Au moment où M. Green devait se procurer du capital pour son entreprise, personne ne pouvait lui présenter d’investisseurs en capital-risque ni le faire entrer dans des cercles influents. « C’est un milieu très fermé », affirme M. Green, qui conseille aux fondateurs d’entreprise technologique noirs de tirer parti de toutes les rencontres qu’ils font et de formuler une vision inspirante pour leur entreprise qui amènera les gens à vouloir y investir.
Pour décider d’investir ou non dans une entreprise, Mme Birikundavyi affirme que BKR accorde beaucoup d’importance aux personnes qui la dirigent.
« Nous investissons dans des fondateurs qui n’ont pas froid aux yeux, qui savent où ils s’en vont et qui sont déterminés à trouver le moyen d’y parvenir. »
« Nous investissons dans des fondateurs qui n’ont pas froid aux yeux, qui savent où ils s’en vont et qui sont déterminés à trouver le moyen d’y parvenir. » Mme Birikundavyi a été impressionnée par la connaissance approfondie qu’avait ARTERNAL du milieu de l’art. Que ce soit en passant du temps avec des employés débutants ou en concevant des solutions de concert avec ses premiers clients, M. Green a déployé tous les efforts possibles pour bien comprendre les besoins de ses clients. « C’est ce qui a convaincu l’équipe de BKR. »
« Chercher des fonds est difficile, peu importe la couleur de votre peau, souligne M. Green. Il faut créer un arc narratif pour que les gens s’intéressent à l’histoire de l’entreprise, un peu comme pour un film à succès. » Cependant, il admet que les entrepreneurs noirs doivent composer avec des obstacles particuliers. « Je cherche à réduire les points de friction pour les autres fondateurs d’entreprise noirs, pour qu’ils puissent avancer plus vite que moi. »
Accroître la diversité dans les réseaux
Au sein de Tribe Network, M. Burgesson aide les fondateurs d’entreprise noirs, autochtones et de couleur à réussir. Pour mener à bien sa mission, il travaille à leur donner accès à une communauté, à de l’accompagnement et à du capital. « Nous cherchons des gens comme M. Green qui peuvent leur offrir du mentorat et de l’accompagnement, indique M. Burgesson. « Il faut des personnes qui sont déjà passées par là. Ce n’est pas du temps avec un gestionnaire de dossier que nous donnons aux fondateurs d’entreprise, mais plutôt un accès à des gens qui pourront les aider. »
Les communautés formées des personnes noires, autochtones et de couleur créent elles-mêmes de plus en plus d’occasions à saisir, ce qui accroît la diversité dans l’écosystème et permet aux entrepreneurs de préserver leur authenticité.
« Si les gens ne font que s’arrêter à mes tresses, je ne veux pas travailler avec eux. Nous ne pouvons pas nous cacher. »
« Je porte toujours quelque chose qui met en valeur mes racines africaines, que ce soit des boucles d’oreilles ou des vêtements », affirme Mme Birikundavyi. L’an dernier, M. Burgesson a décidé de se faire des tresses pour montrer son attachement à sa culture, malgré la mise en garde de son père, qui craignait que cela lui nuise. « Je lui ai dit : “Si les gens ne font que s’arrêter à mes tresses, je ne veux pas travailler avec eux.” Nous ne pouvons pas nous cacher. »
Pour Mme Birikundavyi, il est tout aussi important de créer un écosystème. En tant que premier fonds dirigé par des Noirs au Canada, BKR comprend la responsabilité qui lui incombe. « La plupart des entreprises de notre portefeuille récolent moins de financement que leurs pairs au sein de l’écosystème élargi, mais elles font des miracles avec ce qu’elles ont, soutient Mme Birikundavyi. Nous voulons changer les choses et appuyer plus d’entrepreneurs talentueux en leur fournissant assez de capital pour assurer la stabilité et la prospérité de leur entreprise. »
Accroître la diversité dans l’écosystème est l’affaire de tous
Avec l’arrivée d’un nombre accru de fonds et de groupes soutenant les jeunes entreprises appartenant à des Noirs, comme le Fonds de prospérité pour l’avancement des communautés noires (qui compte M. Burgesson comme membre à son conseil d’administration), les programmes d’innovation pour les Noirs (BIP), la Black Entrepreneur Alliance et le Black Founders Network, les occasions qui s’offrent aux entrepreneurs noirs augmentent lentement, mais sûrement.
« Il faut qu’une plus grande part des investissements soit accordée aux fondateurs d’entreprise issus de groupes sous-représentés, et ce, à toutes les étapes, du prédémarrage au financement de série C, et ne pas se limiter aux subventions ou au financement sans effet dilutif », déclare M. Burgesson. Les entreprises en démarrage appartenant à des Noirs reçoivent de l’appui d’un nombre accru de fonds, ce qui est un pas dans la bonne direction. « Tribe lance un fonds pour aider les jeunes entreprises fondées par des personnes racisées, y compris les entreprises en démarrage dirigées par des Noirs, dit M. Burgesson.
M. Burgesson souligne que les institutions financières peuvent aussi jouer un rôle important en tentant de mieux comprendre la réalité des fondateurs d’entreprise noirs.
« Si un plus grand nombre d’employés racisés, noirs ou nouvellement arrivés au pays participent aux programmes communautaires et au processus de financement, la confiance de notre communauté envers l’institution augmentera grandement », estime M. Burgesson. Il ajoute qu’il est important de créer avec des partenaires un écosystème favorable aux fondateurs qui regroupera les ressources de chacun, et il encourage les institutions à investir dans les organisations et les fonds qui sont proches de la communauté.
« Lorsqu’ils ont les moyens d’agir, les fondateurs d’entreprise de groupes sous-représentés arrivent à résoudre de gros problèmes et s’en sortent très bien », conclut M. Burgesson.
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